Carnets d’art: d’âme-d’art

Par Flannie • 5 déc, 2010 • Catégorie: Carnets d'art, Derniers coups de talons

Mes chères pointures, habitué(e)s ou anonymes, Isabelle, Sarah, Poumok, Fanette, Catherine, Jicky, Bénétie, Miss Brownie, Cranemou, Malicia, Cleopat, Bavardises, Caroline, Babouchka, Difrarel, le Petit Chaperon Rouge, Mamsam, Elise, Kaki, Little Style Box, Isis Potins, Anacoluthe, Pierre-Jean et sa cravate noire, la Mère joie , Fleur2palmier, Bulles d’infos , Pinassotte, La mite orange, Bénédicte, Bérengère, Cecy, Mrs B et Lionel,

Photo de l' AFP

Dans Libération, lundi dernier, les héritiers de Picasso côtoyaient la créatrice d’Hello Kitty. Ajoutez à cela une discussion surréaliste entre une jeune serveuse, son chirurgien-dentiste et son petit ami avec lequel elle se disputait sur fond sonore de Hey ! Baby comme à la belle époque de Dirty Dancing et vous comprendrez peut-être mon amusement en reliant les deux articles. Celui sur l’affaire Picasso a été rédigé par Vincent Noce tandis que le portrait de Yuko Shimizu a été dressé par Olivier Séguet. Le rapport entre les deux, me demanderez-vous ? Une certaine histoire d’âme…

Picasso et son épouse auraient offert à un électricien ayant effectué plusieurs travaux chez eux 271 œuvres inédites. Ce monsieur aujourd’hui à la retraite a demandé à Claude Picasso, fils du peintre et administrateur de sa succession d’authentifier ces trésors et il s’est vite retrouvé en garde à vue. Les héritiers Picasso portent aujourd’hui plainte pour recel, jugeant l’histoire du vieil homme absolument improbable.

« Picasso avait une si haute conscience de son œuvre qu’il lui arrivait de racheter des tableaux comptant pour lui. Il gardait tout, jusqu’à sa première peinture, un torero réalisé à 8 ans… »

Claude Picasso ajoute:

« Beaucoup de ces pièces (en référence aux œuvres détenues par l’électricien) ne sont pas datées, ce qui signifie qu’elles n’auraient jamais dû quitter l’atelier. (…) Certes, Pablo Picasso était assez généreux. Mais il datait, signait et dédicaçait toujours ses dons, d’autant qu’il savait que certains les vendraient pour faire face à leurs besoins. »

D’un autre côté, je découvre enfin Yuko Shimizu, la créatrice d’un personnage qui m’a toujours profondément agacée : Hello Kitty. Bizarrement, Yuko me plait autant que Kitty m’insupporte. Elle a l’air aussi élégante et profonde que son personnage semble dépourvu d’âme et de relief.

Photo de Léa Crespi pour Libération

Née juste après la guerre, cette japonaise extrêmement discrète raconte qu’un de ses plus grands souvenirs d’enfance est un chaton blanc qu’elle a reçu pour ses trois ans de la part de son père qui, à l’époque, tenait un magasin de jouets.

« Dans le Japon déboussolé de l’après-guerre, les animaux de compagnie ont joué un rôle très important dans les foyers. Ma mère était gravement malade des poumons et ce chat nous a permis de concentrer nos émotions sur lui, de les dévier, de les apaiser. »

Kitty est-elle alors devenu un « tampon » de l’âme de Yuko en la créant ?

Yuko pensait devenir professeur de dessin mais la compétition était si rude qu’elle a répondu à une petite annonce passée par une société spécialisée en papeterie à la recherche d’un designer graphiste. J’apprends ainsi que Kitty est née la même année que moi mais elle, elle ne grandit pas.

« Au plus profond de moi, je n’ai jamais tenu Kitty pour de l’art ni pour une marchandise. Une mascotte est-elle une œuvre ? Je vous retourne la question. Je crois que Hello Kitty est indifférente à l’art. je l’ai créée dans le but de plaire, d’être déclinée et vendue. Ce n’est pas une réalisation visant à exprimer une idée personnelle ou particulière. »

Me voici donc fixée sur un point.

Parlant de l’exposition pour les 30 ans d’Hello Kitty, elle précise:

« Cet hommage était de l’art mais Kitty n’en est pas. Elle n’est pas l’œuvre, elle est la muse. Ce qui me paraît étrange, c’est que des artistes la ressentent comme habitée, qu’elle les inspire. »

Si cette élégante japonaise sort aujourd’hui de l’ombre au même titre que l’(in)fortuné électricien, c’est pour présenter elle aussi quelque création inédite : un nouveau personnage prénommé Rebecca Bonbon, un bouledogue français qui tient son nom d’un roman de Daphné du Maurier.

Je remercie la vieille dame au manteau rouge d’avoir si longtemps attendu que je recopie toutes les citations dans Libé avant de pouvoir le lire et ne peux m’empêcher ce soir de me poser ces questions :

Une œuvre d’art peut-elle survivre sans son âme ?

Une création sans âme peut-elle être considérée comme une œuvre d’art ?

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8 Réponses »

  1. ”

    il a mis du temps cet électricien pour mettre tout le monde « au courant » de son trésor !
    mais comment pourrait il prouver qu il dit vrai? pas facile le bras de fer avec les héritiers!

  2. C’est le besoin de faire authentifier les croquis qui l’a poussé à montrer sa collection. 271 oeuvres que Picasso lui aurait données… Tu imagines ?

  3. Tes deux dernières questions sont subtiles et fortement connotées philosophie…. et en ce jour de mon anniversaire mon esprit n’est plus bien frais….

    J’ai interviewé Nine d’Urso la fille ainée d’Ines de la Fressange sur mon blog….

    Isis

  4. Tu peux demander à la dame où elle a trouvé le décor derrière elle? J’obsessionne sur son mur.

  5. Je me demande si la photo a été prise au Japon ou dans un hôtel parisien lors de la venue de Yuko Shimizu.

  6. @ ISIS: Joyeux anniversaire !

  7. Ouh là, ardu, en effet, ça me rappelle une dissert en khâgne… Dans mon souvenir, j’en étais arrivé à la notion d’unité qui semble primordiale dans une œuvre d’art, cette impression fugace d’accomplissement qui nous saisit face à une œuvre…

    Bon, après, je me souviens aussi de cette évolution qui m’avait frappée : la notion d’art a été bouleversé par Kant, on est passé du beau intrinsèque (répondant à des codes) au beau « perçu » comme tel par le spectateur, et c’est ça qui a rendu possible l’avènement de l’art moderne (je m’arrête, ça devient chiant, non ?!)

  8. khâgne, gloups ! ;-)
    moi, j’ai arrêté de disserter sur l’art au bac, après avoir eu une note monstrueuse en philo… mais bon, j’avais tellement besoin de faire pipi que j’ai bâclé ma copie.
    Ce qui ne m’empêche pas de pouvoir parler de la notion d’art et d’âme autour du personnage d’Hello Kitty, hein ? ;-)

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